La Dormition de la Vierge
Maso di Banco
Vers 1335
Cabinet du Giotto
Artiste : Maso di Banco
Cette œuvre a donné son nom à la salle où elle est exposée : achetée par le duc d’Aumale en 1879, elle était alors donnée à l’illustre peintre, architecte et sculpteur florentin Giotto. Il fut rendu à l’un de ses plus fidèles élèves, Maso di Banco. Rassemblés autour de la Vierge, les apôtres sont réunis autour de la dépouille de la Vierge, tandis que son fils Jésus-Christ recueille son âme, symbolisé sous les traits d’un enfant. De son maître, Maso retient la sobriété du cadre, presque austère, la suggestion de la profondeur, la présence des personnages aux silhouettes gracieuses, solidement ancrées dans la composition qui donnent une puissance particulière à la narration de l’épisode religieux. Il s’en distingue cependant par une évocation réduite à sa plus simple expression du modelé, qui en fait un peintre d’une élégance discrète, aux tonalités claires. Selon une étude récente, ce panneau aurait fait partie d’un triptyque destiné à la cathédrale de Prato, dont deux fragments sont aujourd’hui conservés à Berlin et à Budapest.
Saint Marc et Saint Matthieu (retable de San Domenico de Fiesole)
Guido di Pietro, Fra Giovanni, dit Fra Angelico
Vers 1425
Tribune
Artiste : Guido di Pietro, Fra Giovanni, dit Fra Angelico
Les deux panneaux proviennent du décor de l’autel majeur de l’église San Domenico de Fiesole, tout près de Florence, l’église du couvent de Fra Angelico. Cet artiste-moine s’était formé à l’enluminure : la minutie de cette technique se retrouve précisément dans ces œuvres figurant les évangélistes Marc et Matthieu, reconnaissables grâce au lion et à l’ange, leurs attributs. La plume et le livre soulignent le moment de la rédaction des évangiles, inspirés par le Verbe, comme le souligne l’ange qui murmure à l’oreille de Matthieu. L’emploi lumineux des couleurs sur le fond d’or qui devait vibrer sous la flamme des chandelles de l’église montre toute la virtuosité du peintre. Ses personnages plus incarnés, aux drapés plus habités, inaugurent une conception plus centrée sur l’homme, un intérêt pour l’imitation de la nature qui anime les peintres de Florence au début du XVe siècle.
Saint Benoît en extase au désert
Guido di Pietro, Fra Giovanni, dit Fra Angelico
Vers 1430
Cabinet du Giotto
Artiste : Guido di Pietro, Fra Giovanni, dit Fra Angelico
Ce petit panneau est un fragment d’un tableau représentant des scènes de la Thébaïde, la région désertique de Thèbes en Égypte où des hommes pieux menèrent une existence érémitique à l’origine du monachisme. Il était peut-être destiné au couvent de Santa Maria degli Angeli de Florence. Il représentait, au centre, les trois morts et les trois vifs et des scènes dépeignant la vie des moines cénobites. Le panneau a été découpé et ses fragments sont aujourd’hui dispersés entre plusieurs musées internationaux. Ce type de découpage permettait, notamment au XIXe siècle, à des marchands de tirer davantage de profit en proposant ainsi des œuvres de plus petits formats, plus faciles à vendre. L’inventivité lumineuse de ce paysage entouré de mer, la douceur qui émane des personnages est caractéristique de Fra Angelico, qui fut l’un des grands innovateurs de la première moitié du XVe siècle à Florence, notamment dans le domaine du tableau d’autel.
Le mariage mystique de saint François avec la Pauvreté
Stefano di Giovanni di Console di Sassetta
1437-1444
Tribune
Artiste : Stefano di Giovanni di Console di Sassetta
Ce panneau ornait autrefois le revers d’un polyptyque monumental, l’un des plus importants du premier Quattrocento, commandé en 1437 par les franciscains pour le maître autel de l’église du couvent de Borgo San Sepolcro (Toscane). Constitué de 60 panneaux, ce polyptyque fut démembré au fil des siècles. Ses fragments subsistants sont aujourd’hui dispersés à travers le monde. Ce panneau représente saint François renonçant au confort et aux biens matériels. Il passe l’anneau au doigt de la Pauvreté, incarnée par une jeune femme en brun sous le regard satisfait de la Chasteté (en blanc) et de l’Obéissance (en rouge). Les trois figures allégoriques s’envolent ensuite : seule la Pauvreté jette un regard en arrière. Sassetta fut l’un des maîtres de l’école de Sienne au Quattrocento. Bien que son style soit marqué par le gothique international, dans ses figures fines, élégantes aux drapés sinueux, ce panneau montre sa maîtrise de la perspective et son approche du paysage comme un espace parcourable, qui indiquent sa connaissance des innovations florentines.
La Vierge de la Miséricorde (Retable Cadard)
Enguerrand Quarton
1452
Cabinet du Giotto
Artiste : Enguerrand Quarton
La Vierge est ici représentée dans une iconographie traditionnelle issue de la tradition byzantine, enveloppant les fidèles de son manteau. À gauche, les religieux, des plus puissants aux plus humbles, et à droite, les laïcs, des souverains aux sujets les plus pauvres. De part et d’autre, les saints Jean-Baptiste et Jean l’évangéliste présentent le couple de donateurs, Jean Cadard, dont ils sont les saints patrons, et son épouse. Le tableau fut commandé en 1452 par leur fils, Pierre, en mémoire de ses parents, pour la chapelle Saint-Pierre dans l’église des Célestins d’Avignon. À cette époque, l’ancien fief pontifical était un carrefour commercial majeur qui attirait les peintres de tous horizons. La monumentalité des figures, la rigueur de la composition, les couleurs intenses, les silhouettes marquées se retrouvent dans les autres œuvres d’Enguerrand Quarton, comme La Pièta de Villeneuve-lès-Avignon (musée du Louvre).
Esther et Assuérus
Botticelli et Lippi
Vers 1475
Santuario
Artiste : Botticelli et Lippi
Lorsqu’une jeune fille de la bonne société florentine se mariait au XVe siècle, elle recevait un coffre « cassone » en cadeau. Les peintures figurées sur les côtés de ces coffres représentent en général des scènes liées à l’amour et au mariage. Ce panneau peint dévoile ainsi une histoire tirée de la Bible : celle d’Esther et Assuérus. Filippino Lippi (1457-1504), était un élève de Botticelli, dont on retrouve ici les figures élancées. Ce panneau est une magnifique illustration des règles de la perspective, qui viennent d’être mises au point à la Renaissance. Découvrez l’épisode « en tête à tête avec un chef-d’œuvre » qui lui est dédié.
Portrait de Simonetta Vespucci
Piero di Cosimo
Vers 1480
Galerie de Peinture / Rotonde
Artiste : Piero di Cosimo
Simonetta Vespucci était, dit-on, l’une des plus belles femmes de Florence au milieu du XVe siècle, elle a notamment servi de modèle à Botticelli. Si le portrait est une ode à la beauté, il est aussi un hommage posthume. Simonetta Vespucci décède en effet précocement à l’âge de vingt-trois ans, de la tuberculose. En souvenir de la jeune femme, Julien de Médicis, frère de Laurent le Magnifique, commande alors le tableau à Piero de Cosimo (1462- 1521). La symbolique, avec le serpent de l’éternel recommencement et les arbres morts d’un côté et vifs de l’autre, évoque la brève destinée du modèle et le cycle de la vie. Découvrez l’épisode « en tête à tête avec un chef-d’œuvre » qui lui est dédié.
Les Trois Grâces
Raphaël
Entre 1504 et 1505
Santuario
Artiste : Raphaël
Ce tableau est le plus petit de Chantilly mais aussi le plus précieux : inspiré d’un marbre antique, il est l’une des rares œuvres profanes peintes par Raphaël (1483-1520).
Une radiographie du tableau a révélé que la composition de Chantilly avait été modifiée par l’artiste : à l’origine, seule une des trois femmes, celle de gauche, tenait dans sa main une boule d’or. Il s’agirait de la représentation du Jugement de Pâris et des trois déesses grecques : Héra, Athéna et Aphrodite. Par la suite, Raphaël mit une pomme dans la main de chacune des femmes qui deviennent ainsi des Hespérides, conférant l’immortalité à ceux à qui elles offriront ces pommes.
La Madone de la maison d'Orléans
Raphaël
Vers 1506-1507
Santuario
Artiste : Raphaël
Ce tableau peint par Raphaël (1483-1520) appartenait aux collections des Orléans jusqu’à la Révolution, d’où son nom. En 1791 Louis-Philippe-Joseph d’Orléans vendit ses peintures et le tableau passa en Angleterre, où le duc d’Aumale le racheta en 1869 en raison de sa provenance familiale. Il s’agit d’un magnifique exemple des Vierges de dévotion réalisées par Raphaël dans sa jeunesse, encore très médiéval dans son iconographie. Le pot de « tyriana » à l’arrière-plan est un remède contre les morsures de serpent, symbole du mal. Le tyriana et la pomme sont donc l’image du rachat du péché par le Christ.
La Vierge de Lorette
Raphaël
1509
Galerie de Peinture / Rotonde
Artiste : Raphaël
Jusqu’en 1976, ce tableau était considéré comme la copie d’un original perdu de Raphaël (1483-1520). Lors de sa restauration, fut identifié le numéro 133 inscrit dans un angle du tableau, qui correspondait au numéro porté par l’original de Raphaël dans la collection Borghèse à Rome. Ce petit rectangle atteste de l’état très obscurci du tableau avant sa restauration.
Cette scène familiale montrant la Vierge tendant un voile au-dessus de son fils, est prétexte à évoquer le destin tragique de Jésus : ce voile symbolise traditionnellement le linceul du Christ.
Portrait de François Ier
Jean Clouet
Vers 1515
Cabinet des Clouet
Artiste : Jean Clouet
Ce portrait représente François Ier, roi de France entre 1515 et 1547. Le roi vient juste de monter sur le trône et de remporter la bataille de Marignan. Le jeune souverain ne porte ni couronne, ni insigne royal.
Ce portrait est caractéristique du style de Jean Clouet (1480-1541). Le personnage se détache sur un fond neutre. Les traits du visage sont dessinés de façon très réaliste à la manière flamande. La pose est hiératique, majestueuse et le modèle ne regarde généralement pas le spectateur.
Portrait de Henri II enfant
Jean Clouet
1524
Cabinet des Clouet
Artiste : Jean Clouet
Au début du XVIe siècle, Jean Clouet puis son fils François popularisèrent une formule de portraits de cour. Auteur du fameux Portrait de François Ier (musée du Louvre), Jean Clouet représente au même moment la progéniture du roi. Il lance alors un véritable genre pictural, celui du portrait d’enfant, que son fils perpétuera par la suite. La formule établie par les Clouet présente le modèle de trois quarts, en buste, évoquant la tradition nordique, mais avec une attention toute particulière à la vérité des traits et à la psychologie du sujet. Toujours réservé, car c’était alors l’usage à la cour, parfois discrètement souriant, le modèle est représenté dans toute la superbe de ses atours et de son rang. Ici, Clouet s’attache à laisser poindre la spontanéité de l’enfance derrière l’expression sage du petit prince qui sert contre lui son chiot. L’épouse d’Henri II , Catherine de Médicis, commandera également à François Clouet une série de portraits de ses enfants.
Portrait d’Odet de Coligny, cardinal de Châtillon
François Clouet
Vers 1548
Rotonde / Galerie de Peinture
Artiste : François Clouet
François Clouet représente ici le cardinal de Châtillon selon une formule différente de ses dessins : le modèle est debout, à mi-corps, devant une tenture, richement vêtu, serrant son gant dans sa main droite. La formule évoque celles que pratiquent Titien ou Bronzino. C’est pourtant bien à Clouet et non à Primatice, comme l’indique l’inscription, qu’il faut rendre ce portrait, par analogie avec un autre portrait peint et un autre dessiné. Les textures de son étole d’hermine, de sa barbe, de l’opulent vêtement écarlate sont rendues avec une précision minutieuse, qui ajoute encore à la superbe du modèle. Neveu du connétable Anne de Montmorency, c’est grâce à celui-ci qu’Odet de Coligny obtint son chapeau de cardinal en 1533, à seize ans. Il s’ouvrit peu à peu aux idées de la Réforme et défendit les protestants auprès de la cour. Converti, il fut menacé par les catholiques et excommunié en 1563. Il trouva refuge en Angleterre, où il mourut, peut-être empoisonné, avant d’avoir pu rejoindre son frère Gaspard de Coligny, dont le meurtre marqua le point de départ de la Saint-Barthélemy.
Portrait de Marguerite de Valois, enfant
François Clouet
Vers 1560
Cabinet des Clouet
Artiste : François Clouet
Les Clouet préparaient leurs portraits à l’aide de dessins tracés à la pierre noire, à la sanguine, éventuellement à la craie blanche, parfois rehaussés de lavis ou d’aquarelle. Ces « crayons » (alors parfois synonyme de « portrait »), deviennent dès lors des œuvres autonomes, que les plus puissants du royaume, comme le roi François Ier ou la reine Catherine de Médicis collectionnent et conservent. Le musée Condé conserve le dessin préparatoire à ce beau portrait qui traduit la vivacité et le sérieux de cette jeune princesse que les chroniqueurs décriront plus tard comme une femme cultivée et spirituelle, témoin du massacre de la Saint-Barthélemy et personnage controversé de la cour. La reine Margot, future épouse d’Henri IV, dévoile dans ce portrait le luxe de la cour des Valois, à travers les dentelles du costume ou le lustre des perles rendus avec finesse.
Portrait du roi Charles IX
François Clouet et atelier
1570
Cabinet des Clouet
Artiste : François Clouet et atelier
Les portraits de Charles IX de Chantilly permettent de suivre l’évolution du souverain, de l’enfance à l’âge adulte. Celui-ci résulte d’une nouvelle commande du jeune roi Valois passée à François Clouet en 1570. À peine un an auparavant, le peintre avait pourtant exécuté un beau portrait en pied de grandes dimensions, envoyé à Vienne en vue de son mariage avec Élisabeth d’Autriche et dont le musée Condé conserve une copie réduite. Mais le roi s’y trouvait trop jeune. Sur celui-ci, Clouet ne modifia pas la représentation du roi, toujours de trois quarts et coiffé de sa toque luxueuse. Il ajouta la fine moustache et barbe du jeune homme de vingt ans à peine. Le roi ne s’en accommoda pas et exigea ainsi de Clouet qu’il le vieillisse davantage. Le souverain perd ainsi les rondeurs de l’enfance pour un visage plus émacié et dont la pâleur reflète sa santé fragile. Le roi s’éteignit en effet à 23 ans de la tuberculose.
Dame au bain
École française
Fin du XVIe siècle
Galerie de Peinture
Artiste : École française
L’iconographie des « dames au bain », popularisée au XVIe siècle en France, était une manifestation de la réception de La Joconde nue de Léonard de Vinci ou son atelier (dont le carton est conservé au musée Condé). Cette beauté nue, présentée à mi-corps et de trois quarts, trouve en effet un écho dans le contexte du bain, préconisé pour les femmes après l’accouchement. La composition de la « dame au bain » est inspirée d’un tableau de François Clouet (conservé à Washington), lui-même influencé par La Joconde nue. Elle montre un nouveau-né dans les bras de la nourrice qui adresse un regard presque complice au spectateur, tandis qu’un enfant taquin chipe un fruit sur la coupe. Fleurs, fruits, dévoilement et érotisme sensuel mêlent subtilement le thème de la maternité à celui de Vénus et de Flore. On a longtemps associé le modèle à Gabrielle d’Estrées, favorite du roi Henri IV et mère de deux de ses enfants.
Vénus endormie avec des amours
Annibale Carracci
1602
Galerie de peinture
Artiste : Annibale Carracci
À l’origine d’un renouveau de la peinture à Rome, Annibale Carracci fut le plus prolixe et le plus couronné de succès des Carrache. Avec son frère Agostino et son cousin, Ludovico, il fonda une académie de dessin à Bologne. Cette institution forma une nouvelle génération de peintres qui s’épanouit à Rome, à travers les commandes du pape ou de son entourage. Avec le décor de la Galerie Farnèse, Annibale, dans un premier temps secondé par Agostino, parvint à proposer un nouveau langage pictural, nourri de la Renaissance, mais dépassant le maniérisme, auquel ils opposent une monumentalité plus classique conjuguée à une vitalité et une énergie sensuelle. C’est dans cette veine que se situe la Vénus endormie, elle aussi destinée aux Farnèse, et exécutée en 1602. Au sommeil de Vénus, la composition oppose l’agitation gaie des petits putti. L’atelier du maître, fort actif, a sans doute pris part à l’exécution de cette toile, inspirée de celle de Titien, mais qui relève également d’influences plus raphaélesques.
Portrait de Gaston de France, duc d’Orléans
Anton Van Dyck
1628-1634
Tribune
Artiste : Anton Van Dyck
Le grand peintre flamand, portraitiste de la cour d’Angleterre, offre ici une effigie somptueuse du frère de Louis XIII, fils d’Henri IV et Marie de Médicis. Le prince, en tenue d’apparat militaire, arbore le cordon bleu du Saint-Esprit. Il tient le bâton de commandement dans la main droite et pose le coude sur un armet richement décoré. Alors premier de la ligne de succession au trône, Gaston n’eut de cesse de défier le roi son frère et dut fuir en 1632 à Bruxelles. C’est peut-être à cette occasion que le peintre, qui s’y trouvait alors, aurait été sollicité pour exécuter ce portrait. La date portée sur le tableau est en effet débattue et la datation de l’œuvre est toujours discutée. Van Dyck rend avec une technique éblouissante le luxe du costume de Gaston, l’enveloppant dans une atmosphère opulente aux tons chauds et dorés. Il rend les différentes textures des étoffes, du métal et des carnations avec une précision qui fait de lui l’un des plus grands portraitistes de son temps.
Le Massacre des Innocents
Nicolas Poussin
Vers 1628-1629
La Galerie de Peinture
Artiste : Nicolas Poussin
Commandé à Nicolas Poussin (1594-1665) pour la décoration du palais de Vincenzo Giustiniani à Rome, ce tableau est inspiré d’un épisode de l’Évangile selon saint Mathieu. Le roi Hérode, averti par les mages que vient de naître à Bethléem le roi des Juifs, décide de faire exécuter tous les enfants de moins de deux ans. Poussin limite le nombre des protagonistes, il réduit sa palette aux couleurs primaires. La composition est construite sur deux diagonales qui convergent vers le visage de la mère terrifiée et hurlante.
Portrait du cardinal de Richelieu
Philippe de Champaigne
1635-1636
Galerie de peinture
Artiste : Philippe de Champaigne
Philippe de Champaigne fut d’abord formé en Flandres avant de s’établir à Paris. Il s’y arrêta sur la route de Rome, qu’il ne gagna finalement jamais. C’est à Paris qu’il devint proche de Nicolas Poussin et fut finalement remarqué par la cour et sollicité par Marie de Médicis. Il exécuta des portraits où se conjuguent maîtrise flamande et classicisme parisien. Il se rapprocha du jansénisme et adopta au fil de sa carrière une manière plus austère et plus sobre. Portraitiste de Richelieu, il représente majestueusement son protecteur, mécène éclairé qu’il représenta à de t : rès nombreuses occasions. Un groupe de portraits le figurent debout, presque en majesté, tandis que celui-ci le montre plutôt grave, sérieux, tout à sa tâche de ministre.
Paysages avec deux nymphes et un serpent
Nicolas Poussin
Fin des années 1650
Galerie de Peinture
Artiste : Nicolas Poussin
Poussin peint ici un paysage de type romain, dans la veine du genre initié au début du XVIIe siècle à Rome, notamment dans l’entourage d’Annibale Carrache, mais aussi grâce à la présence d’artistes flamands toujours plus nombreux dans la ville. Le paysage devient alors presque autonome dans la composition et ne sert plus de simple cadre au sujet. L’artiste français le porte ici à des dimensions imposantes. Sous couvert de sujet mythologique justifié par la présence des personnages, c’est le paysage qui s’impose. Celui-ci est cependant très construit : bien que son aspect rappelle la campagne du Latium, son ordonnancement ne doit que peu à la réalité. Le sujet mythologique choisi par Poussin demeure, comme souvent, énigmatique : les nymphes représentent-elles des cours d’eau, où le serpent revêtirait aussi une symbolique aquatique, ou faut-il les opposer ? Si la production de peinture de paysage était surtout pour lui alimentaire à son arrivée à Rome, il semble y revenir avec un attrait tout particulier à la fin de sa vie, dépassant le modèle romain du début du siècle pour lui insuffler une nouvelle dimension.
Portrait du cardinal Jules Mazarin
Inconnu
1652-1653
Galerie de peinture
Artiste : Inconnu
Formé et protégé par Richelieu, Mazarin lui succéda à sa mort en 1642. Il était alors le ministre de la régente, Anne d’Autriche et du tout jeune roi Louis XIV, auprès duquel il resta jusqu’à sa mort, survenue en 1661. Comme dans les portraits de Richelieu, on retrouve le moiré richement détaillé des étoffes et le modèle saisi dans la gravité et la solennité de sa fonction, dans une posture similaire à celle de son prédécesseur. Champaigne ouvre cependant ici une fenêtre dans la pièce sur une vue du château de Vincennes. Ce détail permet de dater le tableau : Mazarin devint en effet gouverneur de Vincennes en 1652.
Portrait de Molière
Pierre Mignard
Vers 1658
Tribune
Artiste : Pierre Mignard
Pierre Mignard fait partie des grands portraitistes classiques français. Lorsqu’il croise la route de Molière à Avignon en 1658, après avoir travaillé à Orange et à Saint-Rémy, une grande histoire d’amitié commence entre les deux hommes, jusqu’à la mort de l’écrivain en 1673. Le tableau de Chantilly date probablement de cette rencontre, car le modèle paraît avoir moins de quarante ans.
L’Amante inquiète
Jean-Antoine Watteau
1715-1717
Salle Caroline
Artiste : Jean-Antoine Watteau
Au début du XVIIIe siècle, Watteau (1684-1721) créa un genre nouveau en peinture, celui des « fêtes galantes ».
Ses œuvres représentent fréquemment des personnages de la commedia dell’arte, il les met en scène au milieu de fêtes dans des parcs à la tombée du jour où les jeunes gens courtisent les jeunes femmes dans des ambiances un peu mélancoliques. Les roses tenues par la jeune femme représenteraient ainsi le symbole d’un amour déjà consumé.
Le donneur de sérénade
Jean-Antoine Watteau
Vers 1715
Salle Caroline
Artiste : Jean-Antoine Watteau
Ce tableau a souvent été comparé à celui du Metropolitan Museum de New York qui montre Mezzetin, personnage de la commedia dell’arte, jouant de la guitare. Il est vrai que musiciens et comédiens tiennent une place capitale dans l’œuvre de Watteau. La peinture raffinée aux tons délicats de ce peintre inclassable du début du XVIIIe siècle inspire la mélancolie et la douceur de vivre.
Portrait de Louise Henriette de Bourbon Conti, duchesse d'Orléans, en Hébé
Jean-Marc Nattier
1732
Rotonde de la Minerve
Artiste : Jean-Marc Nattier
Déesse de l’éternelle jeunesse dans le panthéon gréco-romain, Hébé était chargée de servir l’ambroisie qui garantissait l’immortalité aux dieux. Il était très à la mode au XVIIIe siècle de se faire portraiturer sous les traits de la déesse, comme ici la duchesse d’Orléans. Assise sur une nuée évoquant l’Olympe, dans une robe à la fluidité antique, éclatante de beauté, elle sert Zeus symbolisé par l’aigle. Le musée Condé conserve également un portrait de Marie-Antoinette dauphine représentée elle aussi en Hébé.
Le Déjeuner de jambon
Nicolas de Lancret
1735
Galerie de peinture
Artiste : Nicolas de Lancret
Connu comme peintre de fêtes galantes, un genre innové par Watteau, Nicolas Lancret reçut cette commande royale de Louis XV, formant pendant avec le Déjeuner d’huîtres de Jean-François de Troy. Elle était destinée à la salle à manger des petits appartements que le roi fit aménager à Versailles. Ici, point de scène galante, mais un repas de chasse, grande passion de Louis XV et dont Lancret se fit une spécialité. Sous l’égide d’un satyre, les convives se délectent d’un jambon, accompagné de vin dont ils ont sans doute abusé à en juger par les bouteilles vides, les assiettes brisées et les visages rubiconds. L’atmosphère champêtre et délicate, induite par le vert moussu des arbres et le kiosque en treillage, est troublée par les couleurs chatoyantes et les attitudes gouailleuses des convives. Le duc d’Aumale acquit ce tableau et son pendant en 1857. Ils avaient appartenu à son père, le roi Louis-Philippe, et le duc y attachait une valeur sentimentale.
Le Déjeuner d’huîtres
Jean-François de Troy
1735
Galerie de Peinture
Artiste : Jean-François de Troy
Ce tableau exécuté par Jean-François de Troy (1679- 1752) fut commandé en 1735 par le roi Louis XV pour la salle à manger des Petits Appartements du château de Versailles, dite des retours de chasse, d’où l’absence de femmes. C’est là qu’il invitait ses amis à déjeuner après la chasse à courre.
Les gentilshommes mangent des huîtres, très à la mode au XVIIIe siècle, dans de la vaisselle d’argent massif et boivent du Champagne, serviteurs et convives suivent des yeux le bouchon, visible au milieu de la colonne de gauche.
Jeune fille
Jean-Baptiste Greuze
Vers 1765
Salle Caroline
Artiste : Jean-Baptiste Greuze
Cette étude de fillette à mi-corps, serait le portrait de Georgette, la fille du portier de Greuze, qui lui servit de modèle pour la jeune sœur de la fiancée dans L’accordée de village du Salon de 1761, tableau (Paris, musée du Louvre) qui fit beaucoup pour la célébrité de Greuze. Selon d’autres historiens, plutôt qu’une étude pour le célèbre tableau du Louvre, il s’agirait d’une reprise isolée qui daterait des environs de 1765.
Napoléon Bonaparte, Premier consul
François Gérard
1803
Tribune
Artiste : François Gérard
Élève de David et d’abord peintre d’histoire, Gérard devient, dans le sillage de son maître, portraitiste de l’empereur et de sa cour. Il exécute ici, un an avant le couronnement de Napoléon, un portrait du jeune général nommé Premier consul de la République et qui use de tous les codes qui seront repris dans le portrait en costume de sacre. La pose hiératique, le visage de face, les mèches de cheveux agitées traduisent le souffle de l’épopée napoléonienne déjà présent, tout comme ils magnifient la figure conquérante, peut-être en référence à Alexandre le Grand. Le regard brillant et presque fiévreux renforce cette impression. Mais comme dans tous les portraits, les traits paraissent idéalisés, car l’empereur ne posait pas et, en fin politicien, souhaitait que son image traduise davantage le mythe de sa personne plutôt qu’une véritable ressemblance.
Autoportrait à vingt-quatre ans
Jean-Auguste-Dominique Ingres
1804
Tribune
Artiste : Jean-Auguste-Dominique Ingres
Cet autoportrait a été commencé par Ingres (1780-1867) à l’âge de 24 ans, au tout début de sa carrière. Le tableau était alors très différent de ce qu’il est aujourd’hui : il comportait en effet de nombreux détails dans le costume et montrait l’artiste peignant le portrait de son ami Gilibert.
Mal accueilli par la critique en 1806, lngres le laissa de côté, le reprit plusieurs fois et l’acheva finalement à l’âge de 71 ans. Ingres a épuré son portrait, ôtant les détails superflus. La palette se réduit à quelques tons chauds, qui mettent en valeur le visage souligné par le blanc de la chemise.
Portrait de Madame Duvaucey
Jean-Auguste-Dominique Ingres
1807
Tribune
Artiste : Jean-Auguste-Dominique Ingres
Madame Duvaucey était la maîtresse du baron Alquier, ambassadeur de France à Rome, elle fut peinte par Ingres en 1807 pendant son séjour à Rome. Ce tableau a été surnommé la « Joconde » d’Ingres (1780-1867). C’est le premier et l’un des plus beaux portraits féminins de l’artiste, tout en courbes. Ruinée à la fin de sa vie, elle rapporta le portrait à Ingres qui le lui racheta.
Antiochus et Stratonice
Jean Auguste, Dominique Ingres
1840
Tribune
Artiste : Jean Auguste, Dominique Ingres
Le sujet est tiré de la Vie des hommes illustres de Plutarque : Stratonice épouse Séleucus Ier Nicator, roi de Syrie, mais Antiochus, le fils de son mari né d’un premier mariage, tombe amoureux d’elle au point d’en mourir. La scène représente l’instant où le médecin Erasistrate comprend la cause de sa maladie : les battements de cœur d’Antiochus s’accélèrent à la vue de Stratonice. Le médecin fait croire au vieux roi qu’Antiochus est amoureux de sa propre femme; Séleucus le supplie de la quitter, puis, ayant appris la vérité, doit s’exécuter pour sauver son fils.
Ingres, qui était musicien, connaissait l’opéra Stratonice créé en 1792 à Paris, dont la musique fut composée par Méhul (1763-1817).
Ingres, qui était reparti en 1834 à la Villa Médicis comme directeur de l’Académie de France, peignit l’œuvre à Rome. Il mit sept ans à réaliser le tableau, exécutant de nombreux dessins et s’inspirant de statues antiques pour la figure de Stratonice. Il traita ce sujet sept fois en soixante-cinq ans.
Le Concert champêtre
Jean-Baptiste-Camille Corot
1844-1857
Galerie de Peinture
Artiste : Jean-Baptiste-Camille Corot
Au bord d’un étang, une violoncelliste joue de la musique. L’une de ses compagnes chante à ses côtés, tandis que l’autre les écoute, allongée dans l’herbe. Les visages de ces jeunes femmes sont à peine esquissés, comme si c’était la musique elle-même que le peintre avait voulu représenter.
Ce tableau de Camille Corot (1796-1875) est l’un des derniers acquis par le duc d’Aumale. Ce dernier disait qu’il aimait que la peinture lui raconte une histoire.
Corps de garde à Meknès
Eugène Delacroix
1847
Salle Isabelle
Artiste : Eugène Delacroix
Ce tableau d’Eugène Delacroix se rattache au mouvement orientaliste. Le peintre avait connu le choc de la découverte de l’Orient lorsque, de janvier à juin 1832, il accompagna une ambassade française qui se rendait au Maroc auprès du sultan Mulay Abd er-Rhaman.
Son séjour à Meknès eut lieu entre la mi-mars et le début avril 1832, avant de regagner Tanger. Il peignit cette composition d’après ses carnets et ses souvenirs, près de quinze ans après l’événement. Le voyage au Maroc reste le moment clef où le chef de l’école romantique se tourne vers l’orientalisme, frappé par la lumière, la couleur et le pittoresque de l’Afrique du Nord.
Suites d’un bal masqué
Jean Léon Gérôme
1857
Salle Isabelle
Artiste : Jean Léon Gérôme
La suite tragique du bal masqué est représentée à l’issue d’un duel où le convive déguisé en Pierrot s’effondre dans les bras de ses témoins alors que son adversaire, déguisé en amérindien, ayant laissé quelques plumes sur la neige, quitte la scène, accompagné d’un Arlequin. Une scène aux personnages presque identiques est représentée la même année par Thomas Couture dans un tableau conservé à Londres (Wallace Collection). Les deux peintres d’histoire s’adonnent ici à la scène de genre qui confine au fait divers, puisqu’il semble que plusieurs duels au bois de Boulogne après des bals masqués aient alors défrayé la chronique. Les personnages de la commedia dell’arte constituent-ils un détail véridique ou soulignent-ils l’absurdité de la tragédie ? Proche de Gérôme, le duc d’Aumale a fait l’acquisition de ce tableau à l’issue de ses expositions au Salon de 1857 à Paris, puis à Londres.
La Chasse aux hérons, Algérie
Eugène Fromentin
1865
Galerie de peinture
Artiste : Eugène Fromentin
Peintre et auteur, Fromentin sera marqué par plusieurs séjours en Algérie, qu’il effectue entre 1846 et 1853. Il ambitionnait de donner à son œuvre une dimension plus scientifique, puisqu’il projetait d’en tirer des récits de voyages et des gravures. Le tableau représente la chasse au héron avec des faucons, une pratique réservée à une élite. Le goût orientaliste du XIXe siècle s’attachait plus volontiers à dépeindre les couleurs et la sensualité d’un exotisme fantasmé. Ici, pourtant, Fromentin se concentre sur l’immensité du paysage, rendue par l’éloignement des cavaliers et sur un ciel chargé, écrasant, qui semble précipiter la lumière vers l’eau et aveugler le spectateur. Il semble vouloir rendre de façon presque documentaire, mais non dénuée de poésie l’Orient qu’il a exploré et qui l’a fasciné.
Les Cuirassiers de 1805. Avant le combat
Jean Louis Ernest Meissonier
1878
Galerie de peinture
Artiste : Jean Louis Ernest Meissonier
Meissonier souhaitait raconter à travers d’ambitieux tableaux la grande épopée napoléonienne qui faisait encore rêver les artistes du XIXe siècle. Il était déjà un artiste reconnu dont les toiles s’arrachaient et faisaient le bonheur des collections lorsqu’il acheva cette toile, qui fut présentée à l’exposition universelle de 1878. Bien que revenant sur les combats napoléoniens, cette composition ne met pas l’empereur à l’honneur. On le devine simplement au loin, coiffé de son bicorne, bras tendu vers le théâtre des opérations. Les officiers s’avancent et, derrière eux, les cavaliers sont en rang. Campée dans un paysage sourd, terne, où la terre ravinée le dispute au ciel morne, Meissonnier semble avoir voulu représenter l’énergie et le frémissement qui précède la bataille. C’est vraisemblablement ce qui plut au duc d’Aumale, qui l’acquit, à son retour d’exil en 1889, pour un prix considérable.